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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/171

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

» La troisième disposition se produit quand la nature de la pierre est victorieuse de la force du projecteur ; le mouvement se fait alors vers le bas selon la nature de la pierre.

» On voit par là comment l’égalité de deux forces, de la force du projecteur et de la force du projectile, est cause du repos qui se produit en l’air. »

Au sujet de ce prétendu repos intermédiaire, les maîtres de Paris se plaisaient, au xive siècle, à développer des considérations toutes semblables à celles que nous venons de lire ; mais pour eux, la force du projecteur, la virtus proficientis, c’était l’impulsion, l’impetus que l’instrument de jet avait imprimé dans le projectile ? Lambert, à cet égard, partage-t-il le sentiment de ces docteurs ? Assurément non, et nous en allons être assurés.

Selon la méthode constamment suivie dans ses Copulata, notre auteur, au sujet du mouvement des projectiles, commence par un commentaire détaillé, par une expositio du texte d’Aristote ; puis il discute deux questions.

« À cette occasion, dit le Commentaire[1], Aristote examine comment se meuvent les projectiles. Il montre, tout d’abord, qu’ils ne se meuvent pas eux mêmes, car ce ne sont pas des êtres animés ; d’autre part, ils ne semblent pas être mûs par ce qui les a lancés, car le moteur qui meut d’une manière effective et le corps mû doivent être ensemble, comme il est dit au septième livre du présent ouvrage. On ne voit donc pas ce qui meut les projectiles après qu’ils sont séparés du projecteur. »

Lambert nous dit alors comment Aristote rejette l’hypothèse de l’antiperistasis, puis il poursuit en ces termes :

« Le Philosophe propose donc une autre solution, qui est celle-ci : L’instrument de projection meut l’air qui l’environne, cet air meut un autre air, et il en est ainsi jusqu’au moment où prend fin la force du projecteur que l’air a reçue (virtus projicientis in aere) ; lorsque cette force vient à faire défaut, le mouvement, lui aussi, fait défaut.

» Cet effet est semblable aux ondes circulaires de l’eau ; une partie de l’eau se trouvant mise en mouvement, cette partie en meut une autre, puis cette dernière partie mise en branle en meut une troisième, et ainsi de suite jusqu’à ce que la force du moteur primitif vienne à cesser ; il en est de même

  1. Lamberti de Monte In octo libros Physicoram copulata, lib. VIII, éd. cit., fol. cxxxxi, col. b et c.