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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/283

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

en est aussi le maximum absolu, en sorte que tout nombre est compris, impliqué dans l’unité. Tout nombre développe donc l’unité, qui est son principe ; et l’unité, qui est le maximum et la fin de tous les nombres, les enveloppe tous ; elle en est la synthèse.

Ce que nous venons de dire du nombre peut se répéter de tout ce qu’on rencontre dans l’Univers concret.

Dans la ligne, on ne trouve rien que le point ; partout où l’on veut diviser la ligne, il y a un point, en sorte que le point concentre et condense, pour ainsi dire, toute la ligne. Le point est donc, à la fois, le principe et le terme, la perfection et la totalité de toute longueur, de toute surface, de tout volume. La longueur est le premier développement du point, la surface en est le second développement et le volume, le troisième.

Qu’est-ce que le mouvement ? Une série d’états de repos qui se suivent l’un l’autre avec continuité, en sorte que le repos est l’unité où le mouvement trouve sa synthèse et que le mouvement développe le repos.

Le présent implique le temps tout entier ; le passé, c’est ce qui fut présent ; le futur, ce qui sera présent ; dans le temps, on ne trouve que des instants qui se succèdent suivant une série continue et dont chacun est présent à son tour. Le présent est donc la synthèse du temps, comme le temps est le développement du présent ; et le présent, c’est l’unité.

De même, l’identité est la synthèse de la diversité, et la diversité le développement de l’identité ; de même, l’égalité est la synthèse de l’inégalité, et l’inégalité le développement de l’égalité ; de même encore la simplicité est la synthèse de la division, et celle-ci ne fait que développer la simplicité.

Ainsi Dieu, qui est l’unité parfaite et le maximum absolu, est la svnthèse de toutes les choses concrètes ; et ces choses concrètes, dans leur pluralité, sont le développement de l’être unique de Dieu.

« Cette synthèse et ce développement, comment se produisent-ils ? Voilà une question qui excède les bornes de notre intelligence. Nous est-il possible de comprendre que la pluralité des choses concrètes découle de l’intelligence divine, en même temps que l’être de ces choses provient de Dieu, qui est l’unité parfaite ? »

La doctrine dont la Docta ignorantia vient de nous tracer le plan est une de celles auxquelles l’esprit de Nicolas de Cues revient le plus volontiers ; en tout ordre de choses, il se plaît