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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/339

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

« fors la violence », le ciel est comme une immense horloge ; ces enseignements tendaient l’un et l’autre à mettre les mouvements des astres sous l’empire d’une Mécanique toute semblable à celle qui régit les mouvements d’ici-bas ; peu à peu, ils ont été si bien détournés de leur véritable intention, qu’ils en sont venus à corroborer cette proposition : Les orbes célestes sont des êtres animés que meut une âme intellectuelle, substantiellement existantes, séparable du corps où elle réside, en un mot analogue à la nôtre.

Ainsi, dans l’esprit de Nicolas de Cues, les doctrines parisiennes se trouvaient altérées et déformées au point de venir en aide à un Néo-platonisme que leurs auteurs eussent repoussé avec indignation.


VII
LA DYNAMIQUE DE NICOLAS DE CUES
ET LA DYNAMIQUE DE KEPLER


L’œuvre de Nicolas de Cues a exercé, vers la fin du xve siècle et au commencement du xvie siècle, une puissante influence ; cette influence, nous aurons maintes fois à la signaler ; nous aurons, en particulier à reconnaître, dans les écrits de Léonard de Vinci, la trace laissée par la pensée du Cardinal allemand. Mais, bien au-delà du temps dont notre livre s’efforce de retracer rhistoire, cette pensée continuera d’exciter d’autres pensées qu’il ne nous sera plus donné de suivre. Or, parmi ces conséquences éloignées des hypothèses de Nicolas de Cues, il en est dont nous voudrions dire ici quelques mots, parce qu’elles explicitent, pour ainsi dire, ce qui demeurait plus ou moins enveloppé dans les suppositions qui les ont produites et qui, par cet effet, se font mieux connaître à nous.

Les conséquences dont nous voulons ici parler se rencontrent dans ce que Képler a dit du mouvement de la terre.

Kepler connaissait et citait avec admiration l’œuvre du Cardinal allemand ; au second chapitre de son Mysterium cosmographiciun, qui est un de ses premiers écrits, il nomme[1]

  1. Joannis Kepleri Astronomi Opera onmia. Edidit Ch. Frisch, Frankfort-sur-Ie-Main et Erlangen, 1858 ; t. I, p. 122.