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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/395

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

à partir de propositions formulées par le Péripatétisme averroïste. En général, ce qu’il prétendra déduire de tels axiomes ce sont les conclusions qu’en ont tirées le Philosophe et son Commentateur. Que ces conclusions contredisent souvent à la foi chrétienne, il ne fera pas difficulté de le reconnaître. Il déclarera nettement qu’on ne saurait se conformer à l’intention d’Aristote et d’Averroès sans rejeter les articles de foi pour leur substituer les théories péripatéticiennes. Il n’insinuera même pas qu’un autre parti pourrait être suivi.

Toutefois, après avoir, dans certains écrits, démontré, sans aucune réserve, la solution péripatéticienne et averroïste d’un problème, il lui arrive, dans d’autres écrits, de déclarer que cette solution ne vaut rien, qu’Aristote et son Commentateur se sont mis en désaccord avec leurs propres principes, et que la raison naturelle, correctement employée, impose des conclusions conformes à l’enseignement de l’Église.

Entre le Péripatétisme averroïste et le Christianisme, Jean de Jandun avait pris une attitude parfaitement logique ; Paul de Venise en prend une autre qui est essentiellement contradictoire.

Nous ne serons pas étonnés si, parfois encore, nous le voyons se contredire lorsqu’il balancera entre la Physique aristotélicienne et la Physique parisienne.


II
l’infini


La Summa totius philosophiæ est certainement postérieure à l’Expositio super libros Physicorum ; aussi ne peut-on passer de cet ouvrage-ci à celui-là sans remarquer que Paul de Venise est devenu beaucoup moins fidèle au Péripatétisme averroïste, beaucoup plus favorable aux idées des Parisiens ; cette remarque, nous allons avoir occasion de la faire en notant ce que notre auteur a dit de l’infini.

La doctrine que l’Expositio professe au sujet de l’infiniment grand est exactement celle d’Aristote et d’Averroès.

Elle commence par établir avec force détails que l’existence actuelle d’un corps infiniment grand est impossible ; puis, avec le Péripatétisme, elle conclut de cette impossibilité à celle du corps infiniment grand en puissance.