passé sans en apercevoir la nouveauté révolutionnaire[1]. Les deux poètes se sont séparés à peu près
à l′époque où Rimbaud dut écrire Marine et Mouvement,
et je me permets d’imaginer que, si la vie en
commun avait continué, Verlaine serait devenu
notre grand vers-libriste.
Une question se pose.
Les deux poèmes de Rimbaud, Marine et Mouvement, ont-ils pu avoir une action spéciale sur l′évolution des jeunes poètes de 1886 ?
On se rappelle que les premiers vers libres publiés après ceux de Rimbaud sont ceux de Gustave Kahn, fin de juin 1886, et de Laforgue mi-août, sans parler des essais non publiés des autres. Marine et Mouvement avaient paru dès la fin de mai et la mi-juin ; mais il est évident que ces poèmes avaient déjà été lus auparavant. J’ignore à quelle date exacte le manuscrit des Illuminations était venu entre les mains de Gustave Kahn[2] ; ce ne put être en tous cas postérieurement au mois de mars 1886,
- ↑ Je ne sais rien dans l’œuvre de Verlaine qui autorise à croire qu’il ait seulement remarqué que Marine et Mouvement aient été écrits en vers libres.
- ↑ Depuis la publication de cette étude dans le Mercure de France j’ai lu dans un article de revue que ce fut Verlaine qui apporta à la Vogue le manuscrit des 'Illuminations. Félix Fénėon m’avait toujours dit au contraire et vient de me confirmer tout récemment que ce manuscrit fut remis à Gustave Kahn par Louis Zénon, frère de Zénon Fière, lequel était alors le collègue de Fénéon au ministère de la Guerre.