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les premiers poètes du vers libre

chez lui, un soir, non tout de suite après son arrivée à Paris, — car je le rencontrai chez Mallarmé et nous ne liâmes pas tout de suite connaissance.

Ainsi, à cette époque, continue René Ghil, Kahn ne pense pas au vers libre, mais il est hanté, en effet, par une formule nouvelle à trouver du poème en prose, dont il me parla longuement.

Ghil rappelait ensuite, non sans raison, « les rapports évidents de la théorie de Kahn avec sa théorie de l’instrumentation verbale ».

Il terminait enfin sa lettre par ces mots :

… Les vers que me lut en cette entrevue Gustave Kahn ne se retrouvèrent pas, certainement, en les Palais Nomades. D’ailleurs Kahn me sembla n’avoir pour eux nul amour. Il se cherchait. Voilà, cher ami, le renseignement, de souvenir demeuré très précis.

Ce témoignage semble, au premier aspect, contredire les affirmations des amis de Gustave Kahn et mes propres hypothèses. À l’examiner de près, il les corrobore plutôt, mais en les précisant. Il résulte, en effet, de ce témoignage que Gustave Kahn, à la fin de l’année 1885, n’a pas montré et vraisemblablement n’avait pas de vers libres qu’il pût montrer à René Ghil ; il en résulte également qu’il était en pleine période de recherches ; et il en résulte encore que ces recherches, c’est dans la voie du poème en prose qu’il les avait commencées. Or, nous devons nous rappeler que ce sont pré-