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Page:Dulaurens - Imirce, ou la Fille de la nature, 1922.djvu/107

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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

donc une coquine dans ta cave ? Les hommes qui font les coquins avec ces filles, les enferme-t-on aussi ? — Non ! — Eh bien ! explique tes contradictions ; dis-moi, mon ami, ne sont-ce pas les hommes qui font les coquines ? Oui, si cela est, as-tu l’ombre du bon sens ? tu empêches les gens de se caresser, tu veux que les filles soient plus sages que ceux qui les tentent.

« Les filles élevées dans les préjugés de ta pudeur ne vont point, je crois, du premier instant de leur puberté, s’offrir à tes vilains hommes ? ce sont ces derniers qui les corrompent ; si ton Platon, le plus sage des mortels, si tes moines étaient caressés, baisés par une jolie fille, tiendraient-ils à ces caresses ? y tiendrais-tu toi-même ? tu veux cependant que les filles soient froides quand tu les échauffes ? tu es injuste ; je me fâche, les gens de ta cave n’ont pas le sens commun : tes raisons, leur poivre, leur tonnerre et tes méchants livres barbouillés, que tu appelles un jeu de cartes, en sont les preuves. »

Nous traversâmes un bois, nous fûmes arrêtés par huit messieurs qui vinrent sur nous avec des tonnerres de poche pour nous donner la puanteur. Ariste leur livra sa bourse ; ils nous fouillèrent, arrachèrent mes bijoux, nous dépouillèrent, et nous souhaitèrent un bon voyage ; revenue de ma peur, je demandai quelle était cette politesse, si c’était le bon ton et le merveilleux savoir-vivre de sa capitale, dont il m’avait tant ennuyée ? — Ces gens,