Page:Dulaurens - Imirce, ou la Fille de la nature, 1922.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
241
IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

me souffler davantage au derrière, et surtout de me conduire à la Cour. » Le bonhomme avait beau menacer, j’étais le maître ; la nuit venue, nous couchâmes à Saint-Cloud.

J’arrivai le lendemain de bonne heure à Versailles. Je fus adressé à un seigneur intendant des menus plaisirs de Sa Majesté ; je restai trois heures dans l’antichambre avant d’avoir audience. Les laquais, en passant et repassant, me regardaient avec l’insolence des laquais des Grands. Je parus devant l’intendant des petits plaisirs de Sa Majesté : « Monseigneur, je désirerais montrer au Roi une momie. » L’intendant me regarda d’un œil caustique, leva les épaules, et me dit : « Voilà un plaisant cadeau à donner au Roi ; quelle est cette momie ? — Monseigneur, c’est celle de mon grand-père. — Le Roi se f… de ton grand-père ; sors-tu de l’hôpital ? si tu apportais la momie du général des jésuites, comme on parle beaucoup de ces fripons, tu ferais peut-être fortune : les Jansénistes te payeraient largement. — Monseigneur, la momie que je veux présenter à Sa Majesté, est une momie parlante. — Va, il n’en manque point à la Cour ; la vieille duchesse… Madame de… la… la… nous ennuyent assez ; on les souffre, à cause de l’étiquette du tabouret… Allons, fais apporter ta momie. — Avant il faut, s’il vous plaît, que j’avertisse Votre Grandeur que le Dieu Xenoti… — Qu’est-ce que ton Dieu Xenoti ? n’est-ce pas celui qui a fait la messe, qui fut conçu de l’Ange Gabriel, né de Ponce-Pilate, condamné à mort par

16