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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

promenâmes quelque temps dans ce lieu délicieux ; je fus frappée de la majesté et du silence, qui régnaient dans cette forêt ; je trouvai ce séjour propre à recueillir l’âme ; un charme secret m’invitait à y rester ; je proposai à mon mentor d’y demeurer. « Le maître de ta cave a fait ce bois pour les hommes, ne sont-ils pas bien insensés de quitter un endroit si délectable, pour habiter dans les pierres, comme les lézards et les grillons ? » Je m’arrachai avec peine de cette forêt, nous retournâmes au château où mon amant me promit de me conduire le lendemain dans un lieu nommé l’église, où je verrais le maître de sa brillante cave : « Surtout, ma chère Imirce, me dit-il, garde un profond silence dans ce lieu ; ne quitte pas ta place, que je ne te donne la main. »

La cave où j’avais été élevée n’était rien en comparaison de celle où brillait le soleil ; je m’imaginai naturellement que le maître de cette belle cave devait être un objet curieux à voir. Cette idée m’empêcha de dormir, tant j’étais impatiente de voir ce grand maître, pour lequel mon philosophe était pénétré d’amour, de respect et de vénération.

Ariste me mena à l’église de bonne heure : en entrant, je fus surprise de voir des hommes contre les murs ; ils ne bougeaient pas ; l’un tenait un gril, l’un avait un cochon à son côté, l’autre un mâtin, deux autres faisaient des souliers, une femme tenait un joli petit enfant dans ses bras, et je ne vis point le maître de la cave.