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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

aussi imparfaits ? — Cet être, répondit Ariste, à quelques ridicules moins, est un homme comme moi ; il s’habille ainsi, parce qu’il croit qu’un habit maussade fait plaisir au maître de notre cave. »

Le discours de mon amant calma un peu ma frayeur. J’examinai le capucin ; plus je le parcourais, plus je doutais qu’il fût homme. En regardant son laid capuchon, en touchant son gros habit, je m’avisai de lever sa jaquette, pour m’assurer qu’il était homme et s’il avait, comme Emilor et le philosophe, ce qui m’avait fait tant de plaisir. Le Père, sur qui ma belle gorge et ma figure avaient fait de promptes impressions, se trouva dans cet état heureux, si maladroitement reproché aux Carmes de la place Maubert. Cette découverte me rassura ; je me figurais qu’un homme qui n’était pas fait comme Emilor ou le philosophe devait être ennemi des femmes.

Le capucin parut honteux, ou fit semblant de l’être ; mon Mentor me gronda de ce que j’avais troussé la jaquette de ce sauvage : « La pudeur, me dit-il, défend ces sortes de libertés à ton sexe. — Qu’est-ce que la pudeur ? — C’est une vertu qui oblige les femmes à rougir quand elles voient un homme nu. — Une femme ne doit donc pas regarder les objets qui lui font plaisir ? Pourquoi veux-tu faire un mystère d’une chose que la nature n’a point faite ? Ta pudeur est bien sotte. Qui a fait ta pudeur ? les hommes ; ils sont donc bien stupides d’avoir fait la pudeur dès qu’elle les gêne ? Tu fais