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LA VILLE SANS FEMMES

acte d’indiscipline. Puis les autorités permirent l’entrée de journaux avec sept jours de retard, mais ce retard fut progressivement réduit jusqu’au moment où nous pûmes les lire au jour le jour. Ensuite nous eûmes la radio qui nous apportait les principales nouvelles régulièrement. Les premiers temps, une véritable soif de nouvelles tourmentait donc tout le monde. Comme les médecins internés et moi étions chaque jour en relations personnelles avec le médecin militaire et le sergent du service sanitaire, les autres internés s’imaginèrent que nous recevions d’eux des confidences et des « tuyaux ». Aussi, à peine la visite officielle était-elle terminée que commençait une sorte de pèlerinage à l’hôpital. Et les questions pleuvaient :

— Qu’a dit le médecin ?

— Avait-il l’air de bonne humeur ?

— A-t-il fait allusion à quelque chose ?

Mais il nous était tout simplement impossible de répondre à la plupart des questions pour la bonne raison que nous ne recevions ni « tuyaux » ni confidences et que nos visiteurs ne commettaient jamais d’indiscrétions.

Ce questionnaire quotidien fournissait toutefois l’occasion de lancer des blagues sur notre condition, blagues qui finissaient par faire rire tout le monde. Par exemple, l’un de nous disait :

— Le médecin militaire nous a dit ce matin que tous les internés seront divisés en deux catégories.

— Ah ! ah ! disait-on plein de curiosité. Et alors ?

— Ceux qui ne seront pas libérés d’un côté et ceux qui resteront ici de l’autre.