Page:Dumarsais - Œuvres, t6, 1797.djvu/42

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il veut jouir en sage économe, des biens que la nature lui offre ; il veut trouver du plaisir avec les autres, et pour en trouver il faut en faire : ainsi, il cherche à convenir à ceux avec qui le hasard ou son choix le font vivre, et il trouve en même temps ce qui lui convient. C’est un honnête homme qui veut plaire et se rendre utile.

La plupart des grands, à qui les dissipations ne laissent pas assez de temps pour méditer, sont féroces envers ceux qu’ils ne croient pas leurs égaux.

Les philosophes ordinaires, qui méditent trop, ou plutôt qui méditent mal, le sont envers tout le monde : ils fuient les hommes, et les hommes les évitent.

Mais notre philosophe qui sait se partager entre la retraite et le commerce des hommes, est plein d’humanité [1]. C’est le Chrémès de Térence qui sent qu’il est homme, et que la seule humanité intéresse à la mauvaise ou à la bonne fortune de son voisin.

Il seroit inutile de remarquer ici combien le philosophe est jaloux de tout ce qui s’appelle honneur et probité : c’est-là son unique religion.

La société civile est, pour ainsi dire, la seule divinité qu’il reconnoisse sur la terre ; il l’encense, il l’honore par la probité, par une attention exacte à ses devoirs, et par un désir sincère de n’en être pas un membre inutile ou embarrassant.

Les sentimens de probité entrent autant

  1. Homo sum, humani nihil à me alienum puto.
    Heautontimorumenos. Act. 1. scen. 1.