Page:Dumarsais - Œuvres, t6, 1797.djvu/43

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dans la constitution méchanique du philosophe, que les lumières de l’esprit : plus vous trouverez de raison dans un homme, plus vous trouverez en lui de probité, au contraire, où règnent le fanatisme et la superstition, règnent les passions et l’emportement : c’est le même tempérament occupé à des objets différens : Madeleine qui aime le monde, et Madeleine qui aime Dieu, c’est toujours Madeleine qui aime.

Or, ce qui fait l’honnête homme, ce n’est point d’agir par amour ou par haine, par espérance ou par crainte [1], c’est d’agir par esprit d’ordre ou par raison : tel est le tempérament du philosophe. Or, il n’y a guère à compter que sur les vertus du tempérament ; confiez votre vin plutôt à celui qui ne l’aime pas naturellement, qu’à celui qui forme tous les jours de nouvelles résolutions de ne s’enivrer jamais.

Le dévot n’est honnête homme que par passions ; or, les passions n’ont rien d’assuré : de plus, le dévot, j’ose le dire, est dans l’habitude de n’être pas honnête homme par rapport à Dieu, parce qu’il est dans l’habitude de ne pas suivre exactement la règle.

La religion est si peu proportionnée à l’humanité, que le plus juste fait des infidélités à Dieu sept fois par jour, c’est-à-dire, plusieurs fois : les fréquentes confessions des plus pieux nous font voir, dans leur cœur, selon leur manière de penser, une vicissitude continuelle du bien

  1. Oderunt peccare boni, virtutis amore. Horat. lib. 1. epist. 16.