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ASCANIO.

Il va sans dire que tous les princes et seigneurs, à l’exception de madame d’Étampes, imitèrent le roi et comblèrent Cellini d’amitiés et d’éloges.

Quand tous furent partis, et que Benvenuto resta seul dans la cour avec ses deux élèves, ceux-ci le remercièrent, Ascanio avec effusion, Pagolo presque avec contrainte.

— Ne me remerciez pas, mes enfans, cela n’en vaut pas la peine. Mais tenez, si vous croyez véritablement m’avoir quelque obligation, je veux, puisque ce sujet de conversation s’est présenté aujourd’hui, vous demander un service ; c’est pour quelque chose qui tient au cœur de mon cœur. Vous avez entendu ce que j’ai dit au roi à propos de Catherine ; ce que j’ai dit répond au plus intime de mon être, Cette enfant est nécessaire à ma vie, mes amis, à ma vie d’artiste, puisqu’elle se prête si gaîment, vous le savez, à me servir de modèle ; à ma vie d’homme, parce que je crois qu’elle m’aime. Eh bien ! je vous en prie, bien qu’elle soit belle et que vous soyez jeunes comme elle est jeune, ne portez pas vos pensées sur Catherine ; il y a bien assez d’autres jolies filles au monde. Ne déchirez pas mon cœur, n’injuriez pas mon amitié en jetant sur ma Scozzone un regard trop hardi, et même surveillez la en mon absence et conseillez-la comme des frères. Je vous en conjure, car je me connais, je me sens, et je jure Dieu que si je m’apercevais de quelque mal, je la tuerais, elle et son complice.

— Maître, dit Ascanio, je vous respecte comme mon maître et je vous aime comme mon père ; soyez tranquille.

— Bon Jésus ! s’écria Pagolo en joignant les mains, que Dieu me garde de penser à une pareille infamie ! Ne sais-je pas, bien que je vous dois tout, et ne serait-ce pas un crime