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Page:Dumas.- Grand dictionnaire de cuisine, 1873.djvu/36

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Il se faisait faire des pâtés de langues de paons, de rossignols, de corneilles, de faisans et de perroquets.

Ayant entendu dire qu’il existait en Lydie un oiseau unique, le phénix, il voulait le manger, et promettait deux cents marcs d’or à celui qui le lui apporterait.

Il nourrissait ses chiens, ses tigres et ses lions avec des faisans, des paons et des perdrix.

Il ne buvait jamais deux fois dans le même vase ; et cependant tous les vases de sa maison étaient d’or et d’argent pur.

Enfin, il brûlait du baume de Judée et d’Arabie au lieu de cire et d’huile.

Sa folie allait plus loin encore.

Il donnait des repas où il conviait huit bossus, huit boiteux, huit chauves, huit goutteux, huit sourds, huit noirs, huit blancs, huit maigres, huit gras. Puis, du haut d’une galerie, entouré de ses courtisans, il regardait cette étrange assemblée.

Il est à remarquer que tous ces grands prodigues sont morts jeunes et de mort tragique.

Xerxès fut tué par le capitaine de ses gardes, Artaban.

Darius fut assassiné par Bessus, satrape de la Bactriane.

Alexandre fut empoisonné par Antipater.

Marc-Antoine se passa une épée au travers du corps.

Cléopâtre se fit piquer par un aspic.

Et enfin Héliogabale, qui avait tout préparé pour sa mort, s’attendant bien à périr dans quelque émeute, Héliogabale qui avait fait paver une cour de porphyre pour s’y précipiter du haut de son palais, qui avait fait creuser une émeraude pour y renfermer du poison, qui avait fait emmancher un poignard d’acier dans une poignée d’or ciselée et toute garnie de diamants pour se poignarder, qui avait fait tisser une corde d’or et de soie pour s’étrangler, Héliogabale, surpris par ses assassins dans les latrines, s’étouffa avec l’éponge dont, dit Montaigne dans son langage naïf, les Romains se torchoyoient le derrière.

Et ces rois si riches rencontraient parfois des sujets aussi riches qu’eux. L’histoire nous a conservé le nom d’un certain Pithius qui, n’étant ni roi ni prince, n’ayant aucun titre ni aucune dignité, donna à manger à toute l’armée de Xerxès, fils