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E

EAU. — Les personnes habituées à l’eau deviennent aussi bons gourmets en eau que les buveurs de vin le deviennent en cette liqueur.

Pendant cinquante ou soixante ans de ma vie je n’ai bu que de l’eau, et jamais Grand-Laffite ou Chambertin n’a fait éprouver à un amateur de vin les mêmes jouissances qu’à moi un verre d’eau de source fraîche, dont aucun sel terreux n’avait pu altérer la pureté.

L’eau très-froide, glacée même artificiellement, agit sur l’estomac comme excellent tonique, sans y exciter aucune irritation, calmant même celle qui pourrait y exister.

Mais il n’en est point ainsi des eaux de neige ou de glace, elles sont lourdes parce qu’elles ne contiennent pas d’air, agitez-les avant de les boire et elles perdront bientôt par l’agitation leurs qualités nuisibles.

Autrefois, Paris tout entier se désaltérait au fleuve qui le traverse ; aujourd’hui, l’eau nous vient de Grenelle ; des tuyaux la conduisent à la montagne Sainte-Geneviève, d’où elle se distribue dans tout Paris ; depuis cinq ou six ans, l’eau de la Dhuys lui fait concurrence et descend du côté opposé, c’est-à-dire de Belleville, Montmartre, la butte Chaumont.

L’eau de Seine était tant calomniée depuis si longtemps, surtout par les provinciaux qui venaient passer quelques jours à Paris, qu’elle s’est lassée de désaltérer deux millions d’ingrats ;