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Page:Dumas.- Grand dictionnaire de cuisine, 1873.djvu/643

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hareng.

uns les autres par milliers sur les bas-fonds ; parfois les filets qu’ils remplissent, trop faibles pour soulever un tel poids, se déchirent et laissent retomber la proie déjà moitié prise ; comme la colonne de feu et de fumée des Hébreux, on peut suivre le jour et la nuit leur émigration : la nuit par l’éclat phosphorescent qu’ils répandent, le jour par les bandes d’oiseaux ichthyophages qui les suivent, plongeant de temps en temps et remontant avec un éclair d’argent au bec ; des baleines, des requins, des marsouins, des bonites, des dorades les suivent, mordent à même du banc, et en font une immense consommation. Bloch a assuré, dit Victor Meunier, que dans une seule localité de la Suède on en pêche annuellement plus de sept millions ; mais la fécondité de ce poisson compense toutes l ?s causes de destruction qui s’attachent à lui ; on a compté dans une seule femelle soixante-six mille six cent six œufs. Ajoutons que l’on l’on compte sept femelles pour deux mâles. La pêche du hareng est la plus importante de toutes, tandis que la pêche de la morue baisse ; et que le Havre, qui a envoyé jusqu’à quarante bateaux à la pêche de la morue, n’en avait envoyé cette année qu’un seul ; on compte huit cent mille personnes que cette branche d’industrie fait vivre ; elle rapporte à l’Europe près de quatre millions de francs. C’est un nommé Bruckalz qui a inventé l’art de fumer les harengs.

La plus belle et la meilleure espèce de harengs frais qu’on mange à Paris est celle qui nous arrive des côtes de Normandie ; nous dirons plus loin de quelle manière on peut les apprêter. Le hareng pec et nouvellement salé doit toujours venir de Rotterdam, de Leawarde ou d’Enkhuisen, en Hollande ; on le coupe par rouelles et on le mange tout cru, sans lui faire subir * aucun autre apprêt que celui d’une salade. Les plus beaux harengs saurs, les plus grands, les plus charnus, les plus dorés, les mieux fumés au genièvre sont les saurets de Germuth, en Irlande.

Presque jamais les harengs salés ne paraissent sur la table des maîtres ; mais ils sont, dans les pays où ils abondent, d’une grande utilité pour les ouvriers et les pauvres.