Et qu’a-t-elle fait ?
Elle l’y a laissé.
La preuve ?
Le voici.
Je vois bien un anneau, mais…
Regardez.
Adèle, Paul.
Sont-ce bien là leurs deux noms de baptême ?
Je l’avoue, je suis battu.
À un autre !
Madame de Vertpré a fait faire son portrait.
Ah ! ah !
Une miniature charmante, d’une ressemblance parfaite.
Après ?
Eh bien, madame de Vertpré m’a chargé de l’aller prendre chez le peintre, et aujourd’hui, quand je le lui ai rendu, elle m’a demandé comment je le trouvais, de manière à me faire croire…
Quoi ?
Qu’il ne tarderait pas à être offert à la personne à qui il est destiné.
Et cette personne ?
C’est ma fête demain, monsieur.
Et la mienne aujourd’hui ; vous voyez qu’on me l’a souhaitée.
Ah !
Continuez, monsieur.
Ma foi, s’il en est ainsi… je vais tout vous dire !
Je suis préparé.
Madame de Vertpré aime la lecture ; souvent, le soir, quand la porte est fermée pour tout le monde, quand Pauline s’est retirée, nous choisissons dans la bibliothèque quelques poésies d’André Chénier ou de Lamartine ; nous ouvrons quelque roman de Nodier ou de Victor Hugo ; et ce sont les pages les plus tendres, les vers les plus délirants que nous cherchons. Puis le livre se ferme, nos paroles succèdent à celles de ces grands auteurs, et elles conservent, sinon le talent, du moins la teinte de leurs ouvrages ; ainsi le temps, si long pour les autres, le temps passe, le temps vole pour nous et…
Et quoi ? Faites-moi donc le plaisir d’achever.
Minuit sonne.
Minuit sonne…
Nous nous promettons pour le lendemain une aussi douce soirée… et je me retire.
Eh bien ! moi, monsieur, c’est exactement la même chose, excepté…
Excepté quoi ?
Excepté que je reste.
Monsieur, c’est une infâme calomnie, et vous me rendrez raison de l’insulte que vous faites à la plus pure des femmes !
Très-bien, jeune homme.
À celle qui, rare entre toutes, n’a pas dans sa vie une pensée coupable à se reprocher… même en rêve !
Bravo !
De la seule femme enfin de l’honneur de laquelle je répondrais sur ma vie !
Permettez que je vous embrasse.
Oh ! ne raillons pas, monsieur, vous m’avez offert des preuves, eh bien ! j’en exige à l’instant, à la minute.
Diable ! mais de pareilles preuves sont difficiles à fournir.
Je vous préviens cependant qu’il m’en faudra, monsieur.