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Page:Dumas - Œuvres - 1838, vol.2.djvu/217

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m. de vertpré.

Une lettre…

léon.

Peut être supposée, et d’ailleurs je ne connais pas son écriture, je ne crois pas m’être vanté qu’elle m’ait écrit. Autre chose, monsieur… autre chose !…

m. de vertpré.

Ah ! pardieu !

(Il tire le portrait de sa poche.)
léon.

Eh bien ! son portrait, je l’ai déjà vu.

m. de vertpré.

Poussez ce petit ressort.

léon.

Ce portrait ne prouve rien, monsieur.

m. de vertpré.

Poussez !

léon, stupéfait.

Le vôtre !

m. de vertpré.

Lisez !

léon.

Donné à mon Adèle le 28 juin 1825, jour de mon mariage.

m. de vertpré.

Le trouvez-vous ressemblant ?

léon.

Le peintre vous a diablement flatté, monsieur !

m. de vertpré.

Cependant vous m’avez reconnu tout de suite.

léon.

Ainsi vous vous nommez ?

m. de vertpré.

Paul de Vertpré.

léon.

Et vous n’êtes pas mort ?

m. de vertpré.

Voyez si je vous en impose.

léon.

Ainsi, le bruit qu’on avait répandu…

m. de vertpré.

Était nécessité par les circonstances.

léon.

Et madame de Vertpré savait que vous étiez vivant ?

m. de vertpré.

Je ne le lui ai jamais laissé oublier, je vous prie de le croire.

léon.

Alors, elle se moquait de moi.

m. de vertpré, riant.

Mais… j’en ai peur.

léon.

C’est bien… je me vengerai.

m. de vertpré, avec inquiétude.

Comment cela ?

léon.

Je m’entends.

m. de vertpré.

Plaît-il ?

léon.

Et tout le monde trouvera que j’ai raison.

m. de vertpré.

Du tout, monsieur, tout le monde vous donnera tort.

léon.

Peu m’importe !

m. de vertpré.

Vous perdrez votre temps.

léon.

Je suis jeune.

m. de vertpré.

Vous vous lasserez.

léon.

J’ai de la patience.

m. de vertpré.

Mais c’est de l’entêtement ! moi, monsieur, je ne vous ai rien fait.

léon.

Aussi, je ne vous en veux pas, à vous…

m. de vertpré.

C’est bien heureux.

léon.

Non, vous êtes un brave homme ! c’est de votre femme que je veux me venger.

m. de vertpré.

Prenez garde, monsieur l’avocat, que nous sommes mariés sous le régime de la communauté.

léon.

Ça m’est égal.

m. de vertpré.

Mais ça ne me l’est pas à moi.

léon.

Tant pis !

m. de vertpré.

Ah çà ! vous êtes fou.

léon.

Non, monsieur, je suis piqué ; on a sa réputation de jeune homme…

m. de vertpré.

Après ?

léon.

Et on tient à la conserver.

m. de vertpré.

Et moi, monsieur, ma réputation de mari, croyez-vous que je veuille la perdre ?

léon.

Ce n’est pas que je l’aime, au moins, votre femme !

m. de vertpré.

Et vous avez raison.