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comte ; je vous remercie, vous avez bien tenu votre promesse. — À qui parlez-vous ? demanda le roi. — À monsieur de Charny, dit-elle bravement. — Oui, pauvre Charny, il a eu bien du mal à venir jusqu’à moi. Et… Gilbert, je ne le vois pas ? ajouta-t-il.

La reine, attentive depuis la leçon du soir :

— Venez souper, dit-elle, sire, en changeant la conversation. Monsieur de Charny, poursuivit-elle, cherchez madame la comtesse de Charny ; qu’elle vienne avec vous. Nous souperons en famille.

Là, elle fut reine. Mais elle soupira en songeant que Charny, de triste qu’il était, redevint joyeux.


XL

FOULON


Billot nageait dans la joie.

Il avait pris la Bastille ; il avait rendu la liberté à Gilbert ; il avait été distingué par Lafayette, qui l’appelait par son nom.

Enfin il avait vu l’enterrement de Foulon.

Peu d’hommes à cette époque étaient aussi exécrés que Foulon ; un seul peut-être eût pu lui faire concurrence, c’était son gendre, monsieur Berthier de Savigny.

Aussi tous deux avaient joué de bonheur le lendemain de la prise de la Bastille.

Foulon était mort, et Berthier s’était sauvé.

Ce qui avait mis le comble à l’impopularité dont jouissait Foulon, c’est qu’à la retraite de monsieur de Necker il avait accepté la place du vertueux Genevois, comme on l’appelait alors, et qu’il avait été trois jours contrôleur général.

Aussi y avait-il eu force chants et danses à son enterrement.

On avait bien eu l’idée un instant de tirer le cadavre de la bière et de le pendre ; mais Billot était monté sur une borne, avait fait un discours sur le respect dû aux morts, et la voiture mortuaire avait continué son chemin.

Quant à Pitou, il était passé à l’état de héros.

Pitou était l’ami de monsieur Élie et de monsieur Hullin, qui daignaient lui faire faire leurs commissions.

Il était en outre le confident de Billot, de Billot, qui avait été distin-