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Page:Dumas - Ange Pitou, 1880.djvu/457

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La porte était fermée, et il y avait sur le seuil extérieur de cette porte un gros chien noir qui montra les dents à Pitou.

— Viens, dit Pitou les larmes aux yeux : viens, Sebastien ; viens à un endroit où je suis sûr au moins qu’il n’y a rien de changé.

Et Pitou entraîna Sébastien vers le cimetière où était enterrée sa mère.

Il avait raison, le pauvre enfant ! là rien n’était changé ; seulement l’herbe avait poussé, et l’herbe pousse si bien dans les cimetières qu’il y avait chance qu’il ne reconnût point la tombe de sa mère.

Heureusement, en même temps que l’herbe, avait poussé une branche de saule pleureur ; la branche, en trois ou quatre ans, était devenue un arbre. Il alla droit à cet arbre et baisa la terre qu’il ombrageait avec la même piété instinctive qu’il avait baisé les pieds du Christ.

En se relevant, il sentit les branches du saule qui, agitées par le vent, flottaient autour de lui.

Alors il tendit les bras, réunit les branches, et les serra sur sa poitrine.

C’était quelque chose comme les cheveux de sa mère qu’il embrassait une dernière fois.

La station des deux enfants fut longue ; cependant la journée s’avançait.

Il fallut quitter cette tombe, le seule chose qui eût paru se souvenir du pauvre Pitou.

En la quittant, Pitou eut un instant l’idée de briser une branche de ce saule et de la mettre à son casque ; mais, au moment de la briser, il s’arrêta.

Il lui semblait qu’il y aurait une douleur pour sa pauvre mère à ce qu’il brisât la branche d’un arbre dont les racines enveloppaient peut-être la bière de sapin disjointe où reposait son cadavre. Il baisa encore une fois la terre, reprit la main de Sébastien et s’éloigna.

Tout le monde était aux champs ou au bois, peu de personnes avaient donc vu Pitou, et déguisé qu’il était par son casque et par son grand sabre, parmi ces personnes aucune ne l’avait reconnu.

Il prit donc la route de Villers-Cotterets, route charmante qui traverse la forêt dans la longueur de trois quarts de lieue, sans qu’aucun objet vivant ou animé songeât à le distraire de sa douleur.

Sébastien le suivait pensif et muet comme lui. On arriva à Villers-Cotterets vers cinq heures du soir.