Page:Dumas - Gabriel Lambert, Meline, 1844.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
95
LE BILLET DE CINQ CENTS FRANCS.

« — Docteur, reprit-il, n’y a-t-il pas une chose qui vous étonne comme moi ?

« — Laquelle ? demandai-je.

« — C’est qu’on ait le courage de contrefaire un billet de banque.

« — Cela m’étonne, parce que c’est une lâche et infâme action.

« — Infâme, peut-être, mais pas si lâche. Savez-vous qu’il faut une main bien ferme pour écrire ces deux petites lignes :

« La loi punit de mort le contrefacteur.

« — Oui, sans doute, mais le crime a son courage à lui. Tel qui attend un homme au coin d’un bois pour l’assassiner, a presque autant de courage qu’un soldat qui monte à l’assaut ou qui enlève une batterie ; cela n’empêche pas qu’on ne décore l’un et qu’on n’envoie l’autre à l’échafaud.

« — À l’échafaud !… Je comprends qu’on envoie un assassin à l’échafaud, mais ne trouvez-vous pas, docteur, que guillotiner un homme pour avoir fait de faux billets, c’est bien cruel ?

« Le baron dit ces mots avec une altération de voix et de visage si visible qu’elle me frappa.