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Page:Dumas - Georges, 1848.djvu/176

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dre et respecter les goûts de chacun. D’ailleurs, il trouvait que Georges, beau comme il l’était, riche comme il l’était, supérieur aux autres comme il l’était, pouvait aspirer à la main de quelque femme blanche que ce fût, cette femme fût-elle Aline, reine de Golconde !

En tout cas, il offrait à Georges un expédient qui simplifiait bien les choses ; c’était, en cas de refus de la part de monsieur de Malmédie, d’enlever Sara et de la déposer dans un lieu du monde quelconque, à son choix, où Georges irait la rejoindre. Georges remercia son frère de son offre obligeante, mais, comme il avait pour le moment un autre plan arrêté, il refusa.

Le lendemain, les habitants de Moka se réunirent presque avec le jour, tant ils avaient de choses oubliées la veille à se redire de nouveau. Vers les onze heures, Jacques eut envie de revoir tout ces lieux où s’était écoulée son enfance, et proposa à son père et à son frère une promenade de souvenirs. Le vieux Munier accepta, mais Georges attendait, comme on se le rappelle, des nouvelles de la ville ; il fut donc obligé de les laisser partir ensemble et de rester à l’habitation où il avait donné rendez-vous à Miko-Miko.

Au bout d’une demi-heure, Georges vit paraître son messager ; il portait sa longue perche de bambou et ses deux paniers, comme s’il eût fait son commerce en ville ; car le prévoyant industriel avait pensé qu’il pouvait sur sa route rencontrer quelque amateur de chinoiseries. Georges, malgré ce pouvoir qu’à si grand’peine il avait conquis sur lui-même, alla ouvrir la porte le cœur bondissant, car cet homme avait vu Sara et allait lui parler d’elle.

Tout s’était passé de la façon la plus simple, comme on doit bien le penser. Miko-Miko, usant de son privilège d’entrer partout, était entré dans la maison de monsieur de Malmédie, et Bijou, qui avait déjà vu sa jeune maîtresse faire au Chinois l’acquisition d’un éventail, l’avait conduit droit à Sara.

À la vue du marchand, Sara avait tressailli ; car, par une chaîne toute naturelle d’idées et de circonstances, Miko-Miko lui rappelait Georges ; elle s’était donc empressée de l’accueillir, n’ayant qu’un regret, c’était d’être forcée de dialo-