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Page:Dumas - Georges, 1848.djvu/299

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y retrouva du feu. Trois des nègres se mirent en chasse des tanrecs. Le quatrième s’occupa de rallumer le foyer. Laïza chercha des herbes pour renouveler l’appareil du blessé.

Si fort de corps, si puissant d’esprit que fût Georges, l’âme avait cependant été vaincue par la matière : il avait la fièvre : il avait le délire, il ignorait ce qui se passait autour de lui et il ne pouvait aider ceux qui essayaient de le sauver ni par le conseil ni par l’exécution.

Cependant le pansement de sa blessure parut lui apporter quelque repos. Quant à Laïza, il ne paraissait soumis à aucun des besoins physiques de la nature. Il y avait soixante heures qu’il n’avait dormi et il ne paraissait pas avoir besoin de sommeil, il y avait vingt heures qu’il n’avait mangé, et il ne semblait pas avoir faim.

Les nègres revinrent les uns après les autres, rapportant six ou huit tanrecs, qu’ils s’apprêtèrent à faire rôtir devant l’immense foyer que leur compagnon avait allumé ; la fumée qu’il occasionnait inquiétait bien un peu Laïza, mais il pensait que, n’ayant laissé aucune trace derrière lui, il devait être à deux ou trois lieues au moins de l’endroit où avait eu lieu le combat, et qu’en supposant même que cette fumée fût découverte, elle le serait par quelque poste assez éloigné pour qu’il eût le temps de fuir avant que ce poste ne les eût rejoint.

Quand le repas fut prêt, les nègres appelèrent Laïza, qui jusque-là était resté assis près de Georges. Laïza se leva, et en portant les yeux sur le groupe qu’il s’apprêtait à joindre, il s’aperçut que l’un des nègres avait reçu à la cuisse une blessure qui saignait encore. Aussitôt toute sa sécurité disparut : on avait pu les suivre à la trace comme on suit un daim blessé, non pas que l’on se doutât de l’importance de la capture que l’on pouvait faire en les suivant, mais parce qu’un prisonnier, quel qu’il fût, était de trop grande importance, à cause des renseignements qu’il pouvait donner, pour que les Anglais ne fissent pas tout au monde pour se procurer ce prisonnier.

Au moment où cette réflexion venait de le frapper, et où il ouvrait la bouche pour ordonner à ses quatre nègres accroupis autour du feu de se remettre en route, un petit bou-