Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/265

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— Ah ! ah !

— Ma foi oui, sire ; il me semble qu’il y a assez longtemps que l’on récompense les services passés, et qu’il serait temps de récompenser les services à venir ; on serait plus sûr de ne pas être payé d’ingratitude.

— Tiens ! c’est une idée cela, dit le roi ; qu’en pensez-vous, monsieur de Sartines ?

— Que tous les dévouements y trouveraient leur compte ; par conséquent je l’appuie, sire.

— Enfin, voyons, comtesse, que demandez-vous pour Zamore ?

— Sire, vous connaissez mon pavillon de Luciennes ?

— C’est-à-dire que j’en ai entendu parler seulement.

— C’est votre faute : je vous ai invité cent fois à y venir.

— Vous connaissez l’étiquette, chère comtesse ; à moins d’être en voyage, le roi ne peut coucher que dans les châteaux royaux.

— Justement, voilà la grâce que j’ai à vous demander. Nous érigeons Luciennes en château royal, et nous en nommons Zamore gouverneur.

— Ce sera une parodie, comtesse.

— Vous savez que je les adore, sire.

— Cela fera crier les autres gouverneurs.

— Ils crieront !

— Mais à raison, cette fois.

— Tant mieux : ils ont si souvent crié à tort ! Zamore, mettez-vous à genoux et remerciez Sa Majesté.

— Et de quoi ? demanda Louis XV.

Le nègre s’agenouilla.

— De la récompense qu’il vous donne, pour avoir porté la queue de ma robe et fait enrager, en la portant, les routiniers et les prudes de la cour.

— En vérité, dit Louis XV, il est hideux.

Et il éclata de rire.

— Relevez-vous, Zamore, dit la comtesse ; vous êtes nommé.

— Mais en vérité, madame…

— Je me charge de faire expédier les lettres, les brevets,