Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/266

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les provisions, c’est mon affaire. La vôtre, sire, est de pouvoir, sans déroger, venir à Luciennes. À compter d’aujourd’hui, mon roi, vous avez un château royal de plus.

— Savez-vous un moyen de lui refuser quelque chose, Sartines ?

— Il existe peut-être, mais on ne l’a pas encore trouvé.

— Et si on le trouve, sire, je puis vous répondre d’une chose, c’est que ce sera M. de Sartines qui aura fait cette belle découverte.

— Comment cela, madame ? demanda le lieutenant de police tout frémissant.

— Imaginez-vous, sire, qu’il y a trois mois que je demande à M. de Sartines une chose, et que je la demande inutilement.

— Et quelle chose demandez-vous ? fit le roi.

— Oh ! il le sait bien.

— Moi, madame, je vous jure…

— Est-ce dans ses attributions ? demanda le roi.

— Dans les siennes ou dans celles de son successeur.

— Madame, s’écria M. de Sartines, vous m’inquiétez véritablement.

— Que lui demandez-vous ?

— De me trouver un sorcier.

M. de Sartines respira.

— Pour le faire brûler ? dit le roi. Oh ! il fait bien chaud ; attendez l’hiver.

— Non, sire, pour lui donner une baguette d’or.

— Ce sorcier vous a donc prédit un malheur qui ne vous est point advenu, comtesse ?

— Au contraire, sire, il m’a prédit un bonheur qui m’est arrivé.

— Arrivé de point en point ?

— Ou à peu près.

— Contez-moi cela, comtesse, dit Louis XV en s’étendant au fond d’un fauteuil et du ton d’un homme qui n’est pas bien sûr s’il va s’amuser ou s’ennuyer, mais qui se risque.

— Je veux bien, sire ; mais vous serez de moitié dans la récompense.