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Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/160

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— Hélas ! hélas ! soupira le vieillard, Andrée, ma pauvre Andrée !

Il retomba sur le banc de pierre adossé à la porte.

— Je la retrouverai morte du vive ! s’écria Philippe d’un air sombre.

Et il reprit sa course avec une fiévreuse activité. Tout en courant, il arrangeait de son bras droit son bras gauche dans l’ouverture de sa veste. Ce bras inutile l’eût gêné pour rentrer dans la foule, et, s’il eût eu une hache, il se le fût abattu en ce moment.

Ce fut alors qu’il retrouva sur ce champ fatal des morts, que nous avons visité, Rousseau, Gilbert et le fatal opérateur qui, rouge de sang, semblait bien plutôt le démon infernal qui avait présidé au massacre que le génie bienfaisant qui venait y porter secours.

Philippe erra une partie de la nuit sur la place Louis XV.

Ne pouvant se détacher de ces murailles du Garde-Meuble, près duquel Gilbert avait été retrouvé, portant incessamment ses yeux sur ce lambeau de mousseline blanche que le jeune homme avait conservé, froissé dans sa main.

Enfin, au moment où les premières lueurs du jour blanchissaient l’orient, Philippe, exténué, prêt à tomber lui-même au milieu de ces cadavres moins pâles que lui, saisi d’un vertige étrange, espérait à son tour, comme avait espéré son père, qu’Andrée serait revenue ou aurait été ramenée à la maison. Philippe reprit le chemin de la rue Coq-Héron.

De loin il aperçut à la porte le même groupe qu’il y avait laissé.

Il comprit qu’Andrée n’avait point reparu et s’arrêta.

De son côté, le baron le reconnut.

— Eh bien ? cria-t-il à Philippe.

— Quoi ! ma sœur n’est point revenue ? demanda celui-ci.

— Hélas ! s’écrièrent ensemble le baron, Nicole et La Brie.

— Rien ? aucune nouvelle ? aucun renseignement ? aucun espoir ?