Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/221

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— Que je vous le présente à son premier débotté.

— Doit-il donc venir de sitôt à Paris ?

— Eh ! Madame, qui sait ? peut-être en a-t-il encore pour un lustre à rester dans sa Bretagne, comme dit ce coquin de Voltaire ; peut-être est-il en route ; peut-être est-il à deux cents lieues ; peut-être est-il à la barrière.

Et le maréchal étudia sur le visage de la jeune femme l’effet des dernières paroles qu’il avait dites.

Mais, après avoir rêvé un moment :

— Revenons au point où nous en étions.

— Où vous voudrez, comtesse.

— Où en étions-nous ?

— Au moment où Sa Majesté se plaît si fort à Trianon, dans la compagnie de M. de Choiseul.

— Et où nous parlions de renvoyer ce Choiseul, duc.

— C’est-à-dire où vous parliez de le renvoyer, comtesse.

— Comment, dit la favorite, j’ai si grande envie qu’il parte, que je risque à mourir s’il ne part pas ; vous ne m’y aiderez pas un peu, mon cher duc ?

— Oh ! oh ! fit Richelieu en se rengorgeant, voilà ce qu’en politique nous appelons une ouverture.

— Prenez comme il vous plaît, appelez comme il vous convient, mais répondez catégoriquement.

— Oh ! que voilà un grand vilain adverbe dans une si petite et si jolie bouche.

— Vous appelez cela répondre, duc ?

— Non, pas précisément ; c’est ce que j’appelle préparer ma réponse.

— Est-elle préparée ?

— Attendez donc.

— Vous hésitez, duc ?

— Non pas.

— Eh bien, j’écoute.

— Que dites-vous des apologues, comtesse ?

— Que c’est bien vieux.

— Bah ! le soleil aussi est vieux, et nous n’avons encore rien inventé de mieux pour y voir.