— Il écrit ! murmura Richelieu. Diable ! si l’on pouvait savoir ce qu’il écrit, ce serait beau, cela.
— Dites-moi ce qu’il écrit, ordonna Balsamo.
— Je ne puis.
— Parce que vous êtes trop loin. Entrez dans le cabinet. Y êtes-vous ?
— Oui.
— Penchez-vous par-dessus son épaule.
— M’y voici.
— Lisez-vous maintenant ?
— L’écriture est mauvaise, fine, hachée.
— Lisez, je le veux.
La comtesse et Richelieu retinrent leur haleine.
— Lisez, reprit Balsamo d’un ton plus impératif encore.
— « Ma sœur », dit la voix en tremblant et en hésitant.
— C’est la réponse, murmurèrent ensemble le duc de Richelieu et la comtesse.
— « Ma sœur, reprit la voix, rassurez-vous : la crise a eu lieu, c’est vrai ; elle a été rude, c’est vrai encore ; mais elle est passée. J’attends demain avec impatience ; car demain, à mon tour, je compte prendre l’offensive, et tout me porte à espérer un succès décisif. Bien pour le parlement de Rouen, bien pour milord X…, bien pour le pétard.
« Demain, après mon travail avec le roi, j’ajouterai un post-scriptum à ma lettre, et vous l’enverrai par le même courrier. »
Balsamo, la main gauche étendue, semblait arracher péniblement chaque parole à la voix, tandis que, de la main droite, il crayonnait à la hâte ces lignes qu’à Versailles M. de Choiseul écrivait dans son cabinet.
— C’est tout ? demanda Balsamo.
— C’est tout.
— Que fait le duc maintenant ?
— Il plie en deux le papier sur lequel il vient d’écrire, puis en deux encore, et le met dans un petit portefeuille rouge qu’il tire du côté gauche de son habit.