Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/294

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— Alors, comte, dit la comtesse, je me prosterne dans mon impuissance.

— Non, comtesse, un jour vous vous acquitterez envers moi. Je vous en donnerai l’occasion.

— Comte, dit le duc à Balsamo, je suis subjugué, vaincu, écrasé ! Je crois.

— Comme saint Thomas a cru, n’est-ce pas, monsieur le duc ? Cela ne s’appelle pas croire, cela s’appelle voir.

— Appelez la chose comme vous voudrez ; mais je fais amende honorable, et, quand on me parlera désormais de sorciers, eh bien ! je saurai ce que j’ai à dire.

Balsamo sourit.

— Maintenant, madame, dit-il à la comtesse, voulez-vous permettre une chose ?

— Dites.

— Mon esprit est fatigué. Laissez-moi lui rendre sa liberté par une formule magique.

— Faites, monsieur.

— Lorenza, dit Balsamo en arabe, merci ; je t’aime ; retourne à ta chambre par le même chemin que tu as pris en venant, et attends-moi. Va, ma bien-aimée !

— Je suis bien fatiguée, répondit en italien la voix, plus douce encore que pendant l’évocation ; dépêche-toi, Acharat.

— J’y vais.

Et l’on entendit avec le même frôlement les pas s’éloigner.

Puis Balsamo, après quelques minutes pendant lesquelles il se convainquit du départ de Lorenza, salua profondément, mais avec une dignité majestueuse, les deux visiteurs, qui, effarés tous deux, tous deux absorbés par le flot des tumultueuses pensées qui les envahissaient, regagnèrent leur fiacre plutôt comme des gens ivres que comme des êtres doués deraison.