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Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/303

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ou de Fœnix, comme vous voudrez l’appeler, maréchal, est le premier homme de ce temps-ci. Ce serait bien dommage qu’on brûlât encore les sorciers.

— Oui, comtesse, oui, c’est un bien grand homme, répondit Richelieu.

— Et un fort bel homme. J’ai un caprice pour cet homme-là, duc.

— Vous allez me rendre jaloux, dit Richelieu en riant, et pressé d’ailleurs de ramener la conversation à un sérieux plus prononcé… Ce serait un terrible ministre de la police que M. le comte de Fœnix.

— J’y songeais, répliqua la comtesse. Seulement, il est impossible.

— Pourquoi, comtesse ?

— Parce qu’il rendrait impossibles ses collègues.

— Comment cela ?

— Sachant tout, voyant tous leurs jeux…

Richelieu rougit sous son rouge.

— Comtesse, répliqua-t-il, je voudrais, si j’étais son collègue, qu’il lût perpétuellement dans le mien, et qu’il vous communiquât les cartes, vous y verriez toujours le valet de cœur aux genoux de la dame et aux pieds du roi.

— Il n’y a personne qui ait plus d’esprit que vous, mon cher duc, répliqua la comtesse. Mais parlons un peu de notre ministère… Je croyais que vous aviez dû faire avertir votre neveu.

— D’Aiguillon ? il est arrivé, madame, et dans des conjonctures qu’un augure romain eût jugées les meilleures du monde : son carrosse a croisé celui de M. de Choiseul partant.

— C’est, en effet, d’un augure favorable, dit la comtesse… Donc, il va venir ?

— Madame, j’ai compris que M. d’Aiguillon, s’il était vu à Luciennes par tout le monde et dans un moment comme celui-ci, donnerait lieu à toutes sortes de commentaires ; je l’ai prié de demeurer en bas, au village, jusqu’à ce que je le mande d’après vos ordres.