Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/51

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— Bien, annoncez.

— Son Éminence le cardinal de Rohan, n’est-ce pas, monseigneur ?

Le prince demeura tout étourdi. Il regarda sur lui, autour de lui, si quelque chose pouvait, dans son costume ou dans son entourage, avoir trahi sa qualité. Il était seul et vêtu en laïque.

— Comment savez-vous mon nom ? demanda-t-il.

— Monsieur vient de me dire, à l’instant même, qu’il attendait Son Éminence.

— Oui, mais demain, après-demain ?

— Non, monseigneur, ce soir.

— Votre maître vient de vous dire qu’il m’attendait ce soir ?

— Oui, monseigneur.

— Bien, annoncez-moi alors, dit le cardinal en mettant un double louis dans la main de Fritz.

— Alors, dit Fritz, que Votre Éminence prenne la peine de me suivre.

Le cardinal fit de la tête un signe annonçant qu’il y consentait. Fritz marcha d’un pas empressé vers la porte de l’antichambre, qu’un grand candélabre de bronze doré éclairait de ses douze bougies. Le cardinal suivait tout surpris et tout rêveur.

— Mon ami, dit-il, en s’arrêtant à la porte du salon, il y a sans doute méprise, et dans ce cas, je ne voudrais pas déranger le comte ; il est impossible que je sois attendu par lui, puisqu’il ignore que je devais venir.

— Monseigneur est bien Son Éminence le cardinal prince de Rohan, évêque de Strasbourg ? demanda Fritz.

— Oui, mon ami. — Alors c’est bien Monseigneur que monsieur le comte attend.

Et allumant successivement les bougies de deux autres candélabres, Fritz s’inclina et sortit.

Cinq minutes s’écoulèrent pendant lesquelles le cardinal, en proie à une singulière émotion, regarda l’ameublement plein