Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/61

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— Vous m’obligez, Monsieur, dit-il, et cela je m’empresse de le reconnaître, mais si cependant la reconnaissance que je vous garde devait être plus lourde que je ne le crois, je n’accepterais point le service. Il y a encore, Dieu merci, dans Paris assez d’usuriers pour que je trouve moitié sur gage, moitié sur ma signature, cent mille écus d’ici à après-demain, et rien que mon anneau épiscopal vaut quarante mille livres.

Et le prélat étendit sa main blanche comme celle d’une femme, à l’annulaire duquel brillait un diamant gros comme une noisette.

— Mon prince, dit Balsamo en s’inclinant, il est impossible que vous ayez pu croire un instant à mon intention de vous offenser.

Puis, comme s’il se parlait à lui-même :

— Il est étrange, continua-t-il, que la vérité fasse cet effet à quiconque s’appelle prince.

— Comment cela ?

— Eh ! sans doute ! Votre Éminence me propose ses services à moi ! Je vous le demande à vous-même, monseigneur, de quelle nature peuvent être les services que Votre Éminence est à même de me rendre ?

— Mais mon crédit à la cour d’abord.

— Monseigneur, monseigneur, vous savez vous-même que ce crédit est bien ébranlé, et j’aimerais presque autant celui de M. de Choiseul qui n’a plus quinze jours peut-être à rester ministre. Tenez, mon prince, en fait de crédit, tenons-nous-en au mien. Voici de bel et bon or. Chaque fois que Votre Éminence en voudra, elle me le fera dire la veille ou le matin même, et je lui en fournirai à son désir.

— De l’or, ce n’est pas tout, murmura le cardinal, tombé au rang de protégé et ne cherchant même plus à reprendre sa position de protecteur.

— Ah ! c’est vrai. J’oubliais, dit Balsamo, que monseigneur désire autre chose que de l’or, un bien plus précieux que toutes les richesses du monde ; mais ceci ne regarde plus la