Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/62

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science, c’est du ressort de la magie. Monseigneur, dites un mot, et l’alchimiste est prêt à faire place au magicien.

— Merci, monsieur, je n’ai plus besoin de rien, je ne désire plus rien, dit tristement le cardinal.

Balsamo s’approcha de lui.

— Monseigneur, dit-il, un prince jeune, ardent, beau, riche, et qui s’appelle Rohan, ne peut pas faire une pareille réponse à un magicien.

— Et pourquoi cela ?

— Parce que le magicien lit au fond du cœur, et sait le contraire.

— Je ne désire rien, je ne veux rien, monsieur, reprit le cardinal presque épouvanté.

— J’aurais cru, au contraire, que les désirs de Son Éminence étaient tels qu’elle n’osait se les avouer à elle-même, reconnaissant que c’étaient des désirs de roi.

— Monsieur, dit le cardinal en tressaillant, vous faites allusion, je crois, à quelques paroles que vous m’avez déjà dites chez la princesse.

— Oui, je l’avoue, monseigneur.

— Monsieur, alors vous vous êtes trompé et vous vous trompez encore maintenant.

— Oubliez-vous, monseigneur, que je vois aussi clairement dans votre cœur ce qui s’y passe en ce moment, que j’ai vu clairement votre carrosse sortir des Carmélites de Saint-Denis, dépasser la barrière, prendre le boulevard et s’arrêter sous les arbres, à cinquante pas de ma maison ?

— Alors, expliquez-vous, et dites-moi quelque chose qui me frappe.

— Monseigneur, il a toujours fallu aux princes de votre maison un amour grand et hasardeux, vous ne dégénérerez pas, c’est la loi.

— Je ne sais ce que vous voulez dire, comte, balbutia le prince.

— Au contraire, vous me comprenez à merveille. J’aurais pu toucher plusieurs des cordes qui vibrent en vous ; mais