Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/109

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manifeste ainsi sa volonté, a seul droit de parler, nul ne répond. Vous leur direz : « Je veux », et ils baisseront la tête…

— Le fait est, dit la comtesse du Barry, que l’idée est pompeuse.

— Pompeuse, oui, répliqua Louis XV ; bonne, non.

— C’est cependant beau, poursuivit madame du Barry avec chaleur, le cortège, les gentilshommes, les pairs, toute la maison militaire du roi, puis une immense quantité de peuple, puis ce lit de justice, composé de cinq oreillers fleurdelisés d’or… Ce serait une belle cérémonie.

— Vous croyez ? dit le roi, un peu ébranlé dans ses convictions.

— Et le magnifique habit du roi, le manteau doublé d’hermine, les diamants de la couronne, le sceptre d’or, tout cet éclat qui convient à un visage auguste et beau. Oh ! que vous seriez splendide ainsi, sire.

— Il y a fort longtemps qu’on n’a vu de lit de justice, dit Louis XV avec une nonchalance affectée.

— Depuis votre enfance, sire, dit madame de Béarn ; le souvenir de votre resplendissante beauté est resté dans tous les cœurs.

— Et puis, ajouta madame du Barry, ce serait une bonne occasion pour M. le chancelier de déployer sa rude et concise éloquence, pour écraser ces gens-là sous la vérité, sous la dignité, sous l’autorité.

— Il faudra que j’attende le premier méfait du parlement, dit Louis XV ; alors, je verrai.

— Qu’attendrez-vous donc, sire, de plus énorme que ce qu’il vient de faire ?

— Et qu’a-t-il donc fait ? Voyons.

— Vous ne le savez pas ?

— Il a un peu taquiné M. d’Aiguillon, ce n’est pas un cas pendable… bien que, fit le roi en regardant madame du Barry, bien que ce cher duc soit de mes amis. Or, si les parlements ont taquiné le duc, j’ai réparé leur méchanceté par mon arrêté d’hier ou d’avant-hier, je ne me souviens plus. Nous voilà donc manche à manche.