Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/111

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La comtesse de Béarn se leva et voulut prendre congé.

— Vous n’êtes pas de trop, madame, lui dit le roi. Bonjour, M. de Maupeou. Quoi de nouveau ?

— Sire, dit en s’inclinant le chancelier, le parlement vous gênait : vous n’avez plus de parlement.

— Et comment cela ? Sont-ils tous morts ? Ont-ils mangé de l’arsenic ?

— Plût au ciel !… Non, sire, ils vivent ; mais ils ne veulent plus siéger, et donnent leurs démissions. Je viens de les recevoir en masse.

— Les conseillers ?

— Non, sire, les démissions.

— Quand je vous disais, sire, que c’était sérieux, dit la comtesse à demi voix.

— Très sérieux, répondit Louis XV avec impatience. Eh bien, monsieur le chancelier, qu’avez-vous fait ?

— Sire, je suis venu prendre les ordres de Votre Majesté.

— Exilons ces gens-là, Maupeou.

— Sire, ils ne jugeront pas davantage en exil.

— Enjoignons-leur de juger… Bah ! les injonctions sont usées… les lettres de jussion aussi…

— Ah ! sire, il faut cette fois montrer de la volonté.

— Oui, vous avez raison…

— Courage, dit tout bas madame de Béarn à madame du Barry.

— Et montrer le maître, après avoir trop souvent montré le père ! s’écria la comtesse.

— Chancelier, dit lentement le roi, je ne sais plus qu’un moyen : il est grave, mais efficace. Je veux tenir un lit de justice ; il faut que ces gens-là tremblent une bonne fois.

— Ah ! sire, s’écria le chancelier, voilà parler ; qu’ils plient ou qu’ils rompent !

— Madame, ajouta le roi en s’adressant à la plaideuse, si votre procès n’est pas jugé, vous le voyez, ce ne sera pas ma faute.

— Sire, vous êtes le plus grand roi du monde.