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Le duc sentit comme un parfum de jeunesse et d’amour embraser, régénérer le sang de son cœur.

— Vous n’êtes pas une femme, dit-il, vous êtes…

— L’Ange, n’est-ce pas ? lui dit à l’oreille la bouche brûlante de la comtesse, qui l’effleura pour lui parler plus bas, et qui l’entraîna à table…

Ce soir-là, M. d’Aiguillon dut se regarder comme bien heureux, car il prit le portefeuille à son oncle et mangea la part du roi.


LXXXIX

LES ANTICHAMBRES DE M. LE DUC DE RICHELIEU.


M. de Richelieu, comme tous les courtisans, avait un hôtel à Versailles, un à Paris, une maison à Marly, une à Luciennes ; un logement, en un mot, près de chacun des logements ou des stations du roi.

Louis XIV, en multipliant ses séjours, avait imposé à tout homme de qualité, privilégié des grandes ou des petites entrées, l’obligation d’être fort riche, pour suivre dans une proportion égale le train de sa maison et l’essor de ses caprices.

M. de Richelieu habitait donc, au moment du renvoi de MM. de Choiseul et de Praslin, son hôtel de Versailles ; c’était là qu’il s’était fait conduire la veille, au retour de Luciennes, après avoir présenté son neveu à madame Dubarry.

On avait vu Richelieu au bois de Marly avec la comtesse, on l’avait vu à Versailles après la disgrâce du ministre, on savait son audience secrète et prolongée à Luciennes ; c’en fut assez pour que toute la cour, avec les indiscrétions de Jean Dubarry, pour que toute la cour, disons-nous, se crût obligée d’aller rendre ses devoirs à M. de Richelieu.

Le vieux maréchal allait donc humer à son tour ce parfum