Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/16

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— Dites donc, comtesse, fit le roi en remontant un degré.

— Sire ?

— Pourvu que le pauvre maréchal n’en meure pas.

— De quoi ?

— De son portefeuille rentré.

— Êtes-vous mauvais ! dit la comtesse en l’escortant d’un dernier éclat de rire.

Et Sa Majesté partit fort satisfaite de son dernier quolibet sur le duc, qu’il exécrait réellement.

Quand madame du Barry entra dans son boudoir, elle trouva d’Aiguillon à genoux devant la porte, les mains jointes, les yeux ardemment fixés sur elle.

Elle rougit.

— J’ai échoué, dit-elle ; ce pauvre maréchal…

— Oh ! je sais tout, dit-il, on entend… Merci, madame, merci !

— Je crois que je vous devais cela, répliqua-t-elle avec un doux sourire ; mais relevez-vous, duc, sinon je croirais que vous avez autant de mémoire que vous avez d’esprit.

— Cela peut bien être, madame, mon oncle vous l’a dit, je ne suis rien que votre passionné serviteur.

— Et celui du roi ; demain, il faudra rendre vos devoirs à Sa Majesté ; relevez-vous, je vous prie.

Et elle lui donna sa main, qu’il baisa respectueusement.

La comtesse fut bien émue à ce qu’il paraît, car elle n’ajouta pas un mot.

M. d’Aiguillon resta aussi muet, aussi troublé qu’elle ; à la fin, madame du Barry relevant la tête :

— Pauvre maréchal, dit-elle encore, il faudra qu’il sache cette défaite.

M. d’Aiguillon regarda ces mots comme un congé définitif, il s’inclina et sortit.

— Madame, dit-il, je vais me rendre auprès de lui.

— Oh ! duc, toute mauvaise nouvelle doit s’annoncer le plus tard possible ; faites mieux que d’aller chez le maréchal, soupez avec moi.