Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

relais de Son Altesse Royale que voulait prendre de vive force ce du Barry.

— Ouais ! fit en lui-même Richelieu, c’est cela justement… tout ce qu’il y a de plus féroce en ennemis de la comtesse… il tombe bien, ce Taverney ! Il prend pour titres de grade des titres d’exclusion formelle…

— Vous ne me répondez pas, duc ? dit Taverney un peu aigri par l’entêtement du maréchal à garder le silence.

— Tout cela est impossible, mon cher monsieur Taverney, répliqua le maréchal en se levant pour indiquer que l’audience était finie.

— Impossible ? une pareille misère impossible ? C’est un ancien ami qui me dit cela ?

— Pourquoi pas ?… Est-ce une raison, parce qu’on est ami comme vous dites, pour chercher à faire… l’un une injustice, l’autre un abus du mot amitié ? Vous ne m’avez pas vu pendant vingt ans, je n’étais rien ; me voici ministre, vous arrivez.

— Monsieur de Richelieu, c’est vous qui êtes injuste en ce moment.

— Non, mon cher, non, je ne veux pas vous laisser traîner dans les antichambres ; moi, je suis un ami véritable, par conséquent…

— Vous avez une raison pour me refuser, cependant ?

— Moi ! s’écria Richelieu très inquiet du soupçon que pouvait avoir Taverney ; moi ! une raison ?…

— Oui, j’ai des ennemis…

Le duc pouvait répondre ce qu’il pensait, mais c’était découvrir au baron qu’il ménageait madame du Barry par reconnaissance, c’était avouer qu’il était ministre de la façon d’une favorite, et voilà ce que le maréchal n’eût pas avoué pour un empire ; il se hâta donc de répondre au baron :

— Vous n’avez aucun ennemi, mon cher ami ; mais moi, j’en ai ; accorder de suite, et sans examen de titres, des faveurs pareilles, c’est m’exposer à ce qu’on dise que je continue Choiseul. Mon cher, je veux laisser des traces de mon passage aux affaires. Depuis vingt ans, je couve des réformes,