Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/26

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des progrès ; ils vont éclore ! la faveur perd la France, je vais m’occuper du mérite. Les écrits de nos philosophes sont des flambeaux dont la lumière n’aura pas été en vain aperçue par mes yeux ; toutes les ténèbres des jours passés sont dissipées, et il était bien temps, pour le bonheur de l’État… Aussi examinerai-je les titres de votre fils, ni plus ni moins que ceux du premier citoyen venu ; je ferai ce sacrifice à mes convictions, sacrifice douloureux sans doute, mais qui n’est que d’un homme au profit de trois cent mille autres peut-être… Si votre fils, M. Philippe de Taverney, me paraît mériter ma faveur, il l’aura, non parce que son père est mon ami, non parce qu’il s’appelle de son nom, mais parce que ce sera un homme de mérite : voilà mon plan de conduite.

— C’est-à-dire votre cours de philosophie, répliqua le vieux baron, qui de rage se rongeait le bout des doigts et appuyait sur son dépit de tout le poids d’un entretien qui lui avait coûté tant de condescendance et de petites lâchetés.

— Philosophie, soit, monsieur ; c’est un beau mot.

— Qui dispense des bonnes choses, monsieur le maréchal, n’est-ce pas ?

— Vous êtes un mauvais courtisan, dit Richelieu avec un froid sourire.

— Les gens de ma qualité ne sont courtisans que du roi !

— Eh ! de votre qualité, M. Rafté, mon secrétaire, en a mille par jour dans mes antichambres, répondit Richelieu, et ils arrivent de je ne sais quel trou de province où l’on apprend à être impoli avec ses prétendus amis, tout en prêchant l’accord.

— Oh ! je sais bien qu’un Maison-Rouge, noblesse issue de croisades, n’entend pas aussi bien l’accord qu’un Vignerot ménétrier !

Le maréchal eut plus d’esprit que Taverney.

Il pouvait le faire jeter par les fenêtres. Il se contenta de hausser les épaules et de répondre :

— Vous êtes trop arriéré, monsieur des croisades : vous n’en êtes qu’au mémoire calomnieux fait par les parlements en 1720, et vous n’avez pas lu celui des ducs et pairs y faisant