Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/263

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— C’est irrévocable ?

— Irrévocable, Lorenza.

— Eh bien, autre chose, dit-elle avec un sourire.

— Oh ! ma bonne Lorenza, souriez encore, encore ainsi et, avec un pareil sourire vous me ferez faire tout ce que vous voudrez.

— Oui, n’est-ce pas, je vous ferai faire tout ce que je voudrai, pourvu que moi je fasse tout ce qu’il vous plaira ? Eh bien, soit. Je serai raisonnable, autant que possible.

— Parle, Lorenza, parle.

— Tout à l’heure vous m’avez dit : « Un jour, Lorenza, tu ne souffriras plus, un jour tu seras libre, un jour tu seras heureuse. »


— Oh ! je l’ai dit, et je jure le Ciel que j’attends ce jour avec la même impatience que toi.

— Eh bien, ce jour peut arriver tout de suite, Balsamo, dit la jeune femme avec une expression caressante que son mari ne lui avait jamais vue que pendant son sommeil. Je suis lasse, voyez-vous, oh ! bien lasse ; vous comprendrez cela, si jeune encore, j’ai déjà tant souffert ! Eh bien, mon ami — car vous dites que vous êtes mon ami — écoutez-moi donc : ce jour heureux, donnez-le-moi tout de suite.

— J’écoute, dit Balsamo avec un trouble inexprimable.

— J’achève mon discours par la demande que j’eusse dû vous faire en commençant, Acharat.

La jeune femme frissonna.

— Parlez, mon amie.

— Eh bien, j’ai remarqué souvent, quand vous faisiez des expériences sur de malheureux animaux, et vous me disiez que ces expériences étaient nécessaires à l’humanité, j’ai remarqué que souvent vous aviez le secret de la mort, soit par une goutte de poison, soit par une veine ouverte, et que cette mort était douce, et que cette mort avait la rapidité de la foudre, et que ces malheureuses et innocentes créatures, condamnées comme moi au malheur de la captivité, étaient libérées tout à coup par la mort, premier bienfait qu’elles eussent reçu depuis leur naissance. Eh bien…