Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/290

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L’escalier se présenta devant elle et fut descendu marche à marche, sans hésitation, sans précipitation ; puis Andrée apparut sur le perron.

Comme Andrée mettait le pied sur la plus haute marche pour descendre, Gilbert mettait le pied sur la plus basse pour monter.

Gilbert vit donc cette femme blanche et solennelle s’avancer comme si elle venait au-devant de lui.

Il recula devant elle, et alla, reculant toujours, s’enfoncer dans une charmille.

C’était ainsi, il se le rappelait, qu’il avait déjà vu Andrée au château de Taverney.

Andrée passa devant Gilbert, l’effleura même et ne le vit pas.

Le jeune homme, écrasé, éperdu, se laissa tomber sur son mollet replié sous lui : il avait peur.

Ne sachant à quoi attribuer cette étrange sortie d’Andrée, il la suivait des yeux ; mais sa raison était confondue, mais son sang battait avec impétuosité ses tempes, mais il était plus près de la folie que de ce froid bon sens qu’il faut à l’observateur.

Il demeura donc accroupi sur l’herbe au milieu des feuilles, et guettant comme il faisait depuis que ce fatal amour était entré dans son cœur.

Tout à coup, le mystère de cette sortie lui fut expliqué : Andrée n’était ni folle, ni égarée, comme il le croyait. Andrée, de ce pas froid et sépulcral, venait à un rendez-vous.

Un éclair venait de sillonner le ciel.

Gilbert, à la lueur bleuâtre de cet éclair, vit un homme caché sous la sombre avenue de tilleuls, et, si rapide qu’eût été la flamme d’orage, il avait vu se détacher sur le fond noir son visage pâle et ses vêtements en désordre.

Andrée marchait vers cet homme, qui tenait un bras étendu comme pour l’attirer à lui.

Quelque chose comme la morsure d’un fer rouge mordit le cœur de Gilbert et le fit se redresser sur ses genoux pour mieux voir.