Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/298

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ses gonds, et de temps en temps repoussée par le vent qui s’engouffrait dans le corridor, frappait avec un grand bruit sur son cadre.

Mais le tumulte de la nature, mais les bruits extérieurs, si terribles qu’ils fussent, n’étaient rien pour Gilbert ; toute sa pensée, toute sa vie, toute son âme, étaient concentrées dans son regard, et son regard était rivé à cet homme.

Cet homme avait traversé l’antichambre, avait passé à deux pas de Gilbert, et sans hésitation était entré dans la chambre.

Gilbert vit cet homme aller en tâtonnant au lit d’Andrée, faire un geste de surprise en trouvant le lit désert, et presque aussitôt heurter du bras la bougie sur la table.

La bougie tomba ; et sur le marbre de la table, Gilbert entendit se briser la bobèche de cristal.

Alors, par deux fois l’homme appela d’une voix étouffée :

— Nicole ! Nicole !

— Comment, Nicole ? se demanda Gilbert du fond de sa cachette. Pourquoi cet homme, lorsqu’il devrait appeler Andrée, appelle-t-il Nicole ?

Mais nulle voix n’ayant répondu à la sienne, cet homme ramassa le flambeau à terre, et, sur la pointe du pied, il alla l’allumer à la veilleuse de l’antichambre.

Ce fut alors que Gilbert concentra toute son attention sur cet étrange et nocturne visiteur ; ce fut alors que ses yeux eussent percé un mur, tant ils mettaient d’active volonté à voir.

Tout à coup Gilbert frissonna, et, tout caché qu’il était, fit un pas en arrière.

À la lueur des deux flammes se combinant, Gilbert frissonnant et à demi mort de stupeur, Gilbert, dans cet homme qui tenait le flambeau à la main, venait de reconnaître le roi.

Alors tout lui fut expliqué : la fuite de Nicole, cet argent compté entre elle et Beausire, et cette porte laissée ouverte, et tout Richelieu, et tout Taverney, et toute cette mystérieuse et sinistre intrigue dont la jeune fille était le centre.

Alors Gilbert comprit pourquoi le roi venait d’appeler Nicole,