Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/301

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dans l’antichambre, aux cloisons de laquelle il se heurta dans son épouvante.

Puis on entendit son pas précipité dans l’escalier, puis sur le sable du jardin ; mais bientôt le vent qui tourbillonnait dans l’espace et tordait les arbres désolés emporta bruit et pas dans son orageuse et puissante haleine.

Alors Gilbert, le couteau à la main, sortit muet et sombre de sa cachette. Il s’avança jusqu’au seuil de la chambre d’Andrée, et contempla, pendant quelques secondes, la belle jeune fille plongée dans un sommeil profond.

Pendant ce temps, la bougie couchée à terre brûlait renversée sur le tapis, éclairant le pied si délicat et la jambe si pure de cet adorable cadavre.

Gilbert ferma lentement son couteau, tandis que son visage prenait insensiblement le caractère d’une inexorable résolution, après quoi il alla écouter à la porte par laquelle était sorti le roi.

Il écouta plus d’une grande minute.

Puis, à son tour, comme le roi avait fait, il ferma la porte et poussa le verrou.

Puis il souffla la veilleuse de l’antichambre.

Puis enfin, avec la même lenteur, avec le même feu sombre dans les yeux, il rentra dans la chambre d’Andrée et mit le pied sur la bougie qui coulait à flot sur le parquet.

Une obscurité subite éteignit le fatal sourire qui se dessinait sur ses lèvres.

— Andrée ! Andrée ! murmura-t-il, je t’ai promis que la troisième fois que tu tomberais entre mes mains, tu ne m’échapperais pas comme les deux premières. Andrée ! Andrée ! au terrible roman que tu m’as accusé de faire, il faut une terrible fin.

Et, les bras tendus, il marcha droit au sofa où Andrée était étendue, toujours froide, immobile et privée de tout sentiment.