dauphine ; toi qui n’auras ni le jeu, ni la promenade, ni le cercle ; toi qui resteras toujours ici, tu risques de mourir d’ennui.
— Oh ! dit Nicole, il y a bien quelque petite fenêtre ; on pourra bien voir un coin de ce monde, ne fût-ce que par l’embrasure d’une porte. Si l’on voit, on peut être vue… Voilà tout ce qu’il me faut ; ne vous inquiétez pas de moi.
— Je le répète, Nicole, non, je ne puis te recevoir sans un ordre exprès.
— De qui ?
— De mon père.
— C’est votre dernier mot ?
— Oui, c’est mon dernier mot.
Nicole tira de sa gorgerette la lettre du baron de Taverney.
— Alors, dit-elle, puisque mes prières et mon dévouement ne font pas d’effet, voyons si la recommandation que voici aura plus de pouvoir.
Andrée lut la lettre, qui était ainsi conçue :
« Je sais, et l’on remarque, ma chère Andrée, que vous ne tenez pas à Trianon l’état que votre rang vous commande impérieusement d’avoir ; il vous faudrait deux femmes et un valet de pied, comme il me faudrait, à moi, vingt bonnes mille livres de revenu ; cependant, comme je me contente de mille livres, imitez-moi et prenez Nicole, qui vaut à elle seule tout le domestique qui vous serait nécessaire.
« Nicole est agile, intelligente et dévouée ; elle prendra vite le ton et les manières de la localité ; vous aurez le soin, non de stimuler, mais d’enchaîner sa bonne volonté. Gardez-la donc, et ne croyez pas que je fisse un sacrifice. Au cas où vous le croiriez, souvenez-vous que Sa Majesté, qui a eu la bonté de penser à nous en vous voyant, a remarqué, ceci m’est confié par un bon ami, que vous manquez de toilette et de représentation. Songez à cela, c’est d’une haute importance.
Cette lettre jeta Andrée dans une perplexité douloureuse.
Ainsi elle allait être poursuivie jusque dans sa prospérité