Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/78

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nomma des commissaires pour le faire imprimer sous leurs yeux. On tira cet arrêt à dix mille exemplaires, dont la distribution fut organisée en un moment.

Après quoi, comme il était dans les formes que le principal intéressé fût informé de ce que la cour avait fait de lui, ces mêmes commissaires se transportèrent à l’hôtel de M. le duc d’Aiguillon, qui venait de descendre à Paris pour un rendez-vous impérieux.

Ce rendez-vous n’était autre chose qu’une explication nette et franche devenue nécessaire entre le duc et son oncle le maréchal.

Grâce à Rafté, tout Versailles avait su en une heure la noble résistance du vieux duc aux ordres du roi, touchant le portefeuille de M. de Choiseul. Grâce à Versailles, tout Paris et toute la France avaient appris la même nouvelle ; en sorte que M. de Richelieu se trouvait depuis quelque temps hissé sur le pavois de la popularité, d’où il faisait des grimaces politiques à madame du Barry et à son cher neveu lui-même.

La position n’était pas bonne pour M. d’Aiguillon, déjà fort impopulaire. Le maréchal, si haï du peuple, mais redouté, parce qu’il était l’expression vivante de la noblesse, si respectée et si respectable sous Louis XV ; le maréchal, si versatile, qu’après avoir choisi un parti on le voyait tirer dessus sans ménagement, lorsque la circonstance le permettait, ou qu’un bon mot en pouvait résulter ; Richelieu, disons-nous, était un fâcheux ennemi à conserver ; d’autant mieux que le pire côté de son inimitié était toujours celui qu’il réservait pour faire ce qu’il appelait des surprises.

Le duc d’Aiguillon avait, depuis son entrevue avec madame du Barry, deux défauts à la cuirasse. Devinant tout ce que Richelieu cachait de rancune et d’appétits de vengeance sous l’apparente égalité de son humeur, il fit ce qu’on doit faire en cas de tempête : il creva la trombe à coups de canon, bien assuré que le péril serait moindre si on s’y jetait courageusement.

Il se mit donc à rechercher partout son oncle pour avoir