Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/77

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Comment ce soufflet serait-il accepté ? Telle était la question que la cour et la ville se posaient chaque matin au lever du soleil.

Les gens du parlement sont d’habiles gens, et là où beaucoup d’autres sont embarrassés, ils voient clair.

Ils commencèrent par bien s’entendre entre eux sur l’application et le résultat du soufflet, après quoi ils prirent la détermination suivante, lorsqu’il fut bien arrêté que le soufflet avait été donné et reçu :

« La cour du parlement délibérera sur la conduite de l’ex-gouverneur de Bretagne, et donnera son avis. »

Mais le roi para le coup en intimant aux pairs et aux princes la défense de se rendre au palais pour assister à quelque délibération que ce fût, touchant M. d’Aiguillon ; ceux-ci obéirent à la lettre.

Alors le parlement, résolu de faire sa besogne lui-même, rendit un arrêt dans lequel, déclarant que le duc d’Aiguillon était gravement inculpé et prévenu de soupçon, même de faits qui entachaient son honneur, ce pair était suspendu des fonctions de la pairie jusqu’à ce que, par un jugement rendu en la cour des pairs dans les formes et avec les solennités prescrites par les lois et ordonnances du royaume, que rien ne peut suppléer, il se fût pleinement purgé des accusations et soupçons entachant son honneur.

Mais ce n’était rien qu’un pareil arrêt rendu en cour de parlement, devant les intéressés, et inscrit aux registres : il fallait la publicité, la notoriété publique ; il fallait ce scandale que jamais chanson ne craint de soulever en France, ce qui rend la chanson souveraine dominatrice des événements et des hommes. Il fallait élever cet arrêt du parlement à la puissance de la chanson.

Paris ne demandait pas mieux que de s’intéresser au scandale ; peu disposé pour la cour, peu pour le parlement, ce Paris en ébullition perpétuelle, attendait quelque bon sujet de rire comme transition à tous ces sujets de larmes qu’on lui fournissait depuis cent ans.

L’arrêt donc étant bien et dûment rendu, le parlement