lettre avec un air d’inquiétude qui se communiqua promptement au maître.
— Qu’est-ce encore, Rafté ? demanda le maréchal.
— Quelque chose de peu agréable, j’imagine, monseigneur, et qui est enfermé là-dedans.
— Pourquoi imagines-tu cela ?
— Parce que la lettre est de M. le duc d’Aiguillon.
— Ah ! ah ! fit le duc, de mon neveu ?
— Oui, monsieur le maréchal. Au sortir du conseil du roi, un huissier de la chambre est venu et m’a remis ce pli pour vous ; voilà dix minutes que je le tourne et le retourne sans pouvoir m’empêcher d’y voir quelque mauvaise nouvelle.
Le duc étendit la main.
— Donne, dit-il, je suis brave.
— Je vous préviens, interrompit Raflé, que l’huissier, en me remettant le papier, a ri jusqu’au fond du gosier.
— Diable ! voilà qui est inquiétant ; donne toujours, répliqua le maréchal.
— Et qu’il a ajouté : « M. le duc d’Aiguillon recommande que M. le maréchal ait ce message sur-le-champ.
— Douleur ! tu ne me feras pas dire que tu sois un mal ! s’écria le vieux maréchal en brisant le cachet d’une main ferme.
Et il lut.
— Eh ! eh ! vous faites la grimace, dit Rafté les mains derrière le dos, en observateur.
— Est-il possible ! murmura Richelieu poursuivant sa lecture.
— C’est sérieux, à ce qu’il paraît ?
— Tu as l’air enchanté ?
— Sans doute, je vois que je ne m’étais pas trompé.
Le maréchal reprit sa lecture.
— Le roi est bon, dit-il au bout d’un instant.
— Il nomme M. d’Aiguillon ministre ?
— Mieux que cela.
— Oh ! oh ! quoi donc ?
— Lis et commente.