Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/116

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— Mais à quel propos me dites-vous cela ? Mais que voulez-vous donc que je fasse ? s’écria Andrée, stupéfaite du ton et du sens des paroles.

— Êtes-vous disposée, oui ou non, à demander quelque chose pour moi et pour votre frère, dites ?

— Monsieur, répondit Andrée, je ferai tout ce que vous m’ordonnerez de faire ; mais, en vérité, ne craignez-vous pas que nous paraissions trop avides ? Déjà le roi m’a fait don d’une parure qui vaut, dites-vous, plus de cent [mille livres. Sa Majesté a, en outre, promis un régiment à mon frère ; nous absorbons ainsi une part considérable des bienfaits de la cour.

Taverney ne put retenir un éclat de rire strident et dédaigneux.

— Ainsi, dit-il, vous trouvez que c’est assez payé, mademoiselle ?

— Je sais, monsieur, que vos services valent beaucoup, répondit Andrée.

— Eh ! s’écria Taverney impatienté, qui diable vous parle de mes services ?

— Mais de quoi me parlez-vous donc, alors ?

— En vérité, vous jouez avec moi un jeu de dissimulation absurde !

— Qu’ai-je donc à dissimuler, mon Dieu ? demanda Andrée.

— Mais je sais tout, ma fille !

— Vous savez ?…

— Tout, vous dis-je.

— Tout, quoi, monsieur ?

Et le visage d’Andrée se couvrit d’une rougeur instinctive, née de cette attaque grossière à la plus pudique des consciences.

Le respect du père envers l’enfant arrêta Taverney sur la pente devenue si rapide de ses interrogations.

— Allons ! soit, tant qu’il vous plaira, dit-il ; vous voulez faire la réservée à ce qu’il paraît, la mystérieuse ! soit. Vous laissez croupir votre père et votre frère dans l’obscurité de l’oubli, c’est bien ; mais rappelez-vous mes paroles : quand ce