Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/117

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n’est pas dès le début qu’on prend de l’empire, on s’expose à n’avoir de l’empire jamais.

Et Taverney fit une pirouette sur le talon.

— Je ne vous comprends pas, monsieur, dit Andrée.

— Très bien ; mais je me comprends, moi, répondit Taverney.

— Cela ne suffit point, lorsqu’on parle deux.

— Eh bien, je serai plus clair : employez toute la diplomatie dont vous êtes pourvue naturellement, et qui est une vertu de la famille, à faire, pendant que l’occasion s’en présente, la fortune de votre famille et la vôtre ; et la première fois que vous verrez le roi, dites-lui que votre frère attend son brevet, et que vous vous étiolez dans un logement sans air et sans vue ; en un mot, ne soyez pas assez ridicule pour avoir trop d’amour ou trop de désintéressement.

— Mais, monsieur…

— Dites cela au roi, dès ce soir.

— Mais où voulez-vous que je voie le roi ?

— Et ajoutez qu’il n’est pas même convenable pour Sa Majesté de venir…

Au moment où Taverney allait, sans doute, par des paroles plus explicites, soulever la tempête qui s’amassait sourdement dans la poitrine d’Andrée et provoquer l’explication qui eût éclairci le mystère, on entendit des pas dans l’escalier.

Le baron s’interrompit aussitôt et courut à la rampe pour voir qui venait chez sa fille.

Andrée vit avec étonnement son père se ranger contre la muraille.

Presque au même moment, la dauphine, suivie d’un homme vêtu de noir et appuyé sur une longue canne, entra dans le petit appartement,

— Votre Altesse ! s’écria Andrée, en réunissant toutes ses forces pour aller au-devant de la dauphine.

— Oui, petite malade, répondit la princesse, je vous amène la consolation et le médecin. Venez, docteur. Ah ! monsieur de Taverney, continua la princesse en reconnaissant le baron,